Justice argentine condamne dix hommes à la perpétuité pour crimes contre l'humanité
3 minutesJustice argentine condamne dix hommes à la perpétuité
Mercredi 27 mars, la justice argentine a prononcé des peines de prison à vie pour dix accusés reconnus coupables de crimes contre l’humanité. Ces condamnations font suite à un procès-fleuve débuté en 2020, concernant douze Argentins accusés d’enlèvements, séquestrations arbitraires, tortures, viols, avortements forcés, disparitions ou vols de bébés.
Émotion et cris de justice dans la salle d’audience
Les condamnations ont été accueillies avec émotion par les proches des victimes et les survivants présents dans la salle d’audience. Des cris de “Prison pour les génocidaires, les assassins, les assassins !” ont retenti à l’annonce des peines. Le tribunal fédéral numéro un de La Plata a prononcé dix peines de réclusion à perpétuité, une peine de vingt-cinq ans et une relaxe contre les accusés. Certains étaient déjà sous le coup de condamnations antérieures.
Les accusés comparaissaient en visioconférence
Les accusés comparaissaient en partie en visioconférence, étant assignés à domicile à l’exception d’un incarcéré. Suite au verdict, le tribunal a ordonné des expertises médicales urgentes pour déterminer la révocabilité de leur détention à domicile et la possibilité de les incarcérer. Le procès concernait plus de 400 victimes passées par trois centres clandestins de détention situés autour de Buenos Aires. Parmi les accusés figuraient des officiers, sous-officiers, policiers, médecins militaires et un ex-ministre provincial.
Nom des accusés et peines prononcées
Le tribunal a condamné mardi Federico Antonio Minicucci, Guillermo Matheu, Carlos Romero Pavon, Roberto Balmaceda, Gustavo Fontana, Jaime Lamont Smart, Jorge Héctor Di Pasquale, Juan Miguel Wolk, Horacio Luis Castillo et le médecin de la police Jorge Antonio Bergés à la prison à vie. L’ancien policier Alberto Julio Candiotti a été condamné à vingt-cinq ans de prison et son collègue Augusto Barré a été acquitté.
Les crimes commis et le travail des associations de défense des droits
Selon l’association des Grands-Mères de la place de Mai, partie civile, 23 femmes enceintes figuraient parmi les détenues passées dans ces Centres de Détention Clandestins (CCD). Certaines furent avortées par leurs bourreaux, certaines ont disparu et dix bébés furent « donnés » à des familles amies du régime, sept de ces enfants ayant retrouvé leur identité d’origine des années plus tard. Le travail de l’association de défense des droits a permis de retrouver l’identité de 133 enfants sur les 400 qui auraient été enlevés selon elle.
Position du gouvernement et bilan de la dictature
Le verdict du tribunal intervient sur fond de résurgence du legs de la dictature dans le débat politique. Le président ultralibéral en fonctions depuis décembre, Javier Milei, conteste à la fois la lecture de cette période – plutôt qu’une dictature, il évoque une « guerre » entre l’Etat et les guérillas d’extrême gauche – et le bilan de 30 000 morts ou disparus, selon les ONG de défense des droits humains. Depuis la reprise en 2006 des procès de la dictature – après une parenthèse d’amnistie dans les années 1990 –, la justice argentine recensait mi-mars 1 176 personnes condamnées, dont 661 étaient en détention, la plupart à domicile. Près de 80 procédures restent en cours, au stade de l’instruction ou du procès.