Tensions et affrontements à N'Djamena : Traque de l'opposant Yaya Dillo et enjeux politiques au Tchad
3 minutesTensions à N’Djamena
Le mercredi 28 février, des tirs ont été entendus dans la capitale tchadienne, N’Djamena, alors que les autorités tentaient d’arrêter l’opposant Yaya Dillo, accusé d’être impliqué dans l’agression du président de la Cour suprême et une attaque contre les locaux des services de renseignement.
Traque de l’opposant Yaya Dillo
Des rafales d’armes automatiques et des détonations ont secoué le centre-ville de N’Djamena, tandis que les forces de défense et de sécurité ont lancé un assaut au siège du Parti socialiste sans frontières pour capturer Yaya Dillo, le président du mouvement. Cette opération, limitée à la zone du quartier Klemat, n’a fait aucune victime officiellement, selon le ministre de la sécurité publique.
Yaya Dillo, membre du clan au pouvoir et cousin du président de la transition, est également soupçonné d’être le commanditaire de l’agression contre le président de la Cour suprême. Cette attaque, qualifiée de tentative d’assassinat, aurait été motivée par une décision défavorable à Yaya Dillo lors d’un conflit interne au sein du Parti socialiste sans frontières. Après l’arrestation de son secrétaire chargé des finances, le PSF affirme qu’il a été exécuté par des agents de l’Agence nationale de sécurité de l’Etat, les services de renseignement.
Situation tendue au Tchad après des affrontements meurtriers
Plus tard dans la soirée, des proches de la victime se sont rassemblées autour du bâtiment de l’ANSE pour réclamer justice
Sur les vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux, on peut voir plusieurs personnes exprimer leur colère, mais sans brandir d’armes et invectiver un groupe de militaires visiblement tendus
Affrontements violents suite à une attaque délibérée
Que s’est-il passé ensuite ? La situation a « pris une tournure dramatique » selon un communiqué du gouvernement avec une « attaque délibérée des complices de cet individu menée par des éléments du PSF et à leur tête le président de ce mouvement Yaya Dillo (…) occasionnant plusieurs morts »
« J’habite à côté de l’ANSE et l’on a même entendu des tirs de bazooka, affirme un ministre sous couvert d’anonymat. Il y a eu neuf morts et dix-huit arrestations. Les assaillants ont aussi abandonné onze véhicules »
Réactions et enjeux politiques au Tchad
Mercredi matin, les accès au siège de l’ANSE et au siège du PSF étaient interdits par des militaires en armes et plusieurs blindés patrouillaient dans la ville. Autour de la présidence, aucun renforcement de la sécurité n’était visible.
« Le peuple tchadien ne devrait pas être concerné par ces rivalités familiales au sein du clan qui a géré le pouvoir depuis plus de 30 ans !, s’insurge l’opposant Brice Mbäimon qui siège au Conseil national de transition, l’assemblée provisoire. Ce n’est pas normal dans une République et c’est un très mauvais signal pour les élections à venir »
Parallèlement, le MPS, parti fondé par le défunt président Idriss Déby, s’est déjà mis en ordre de bataille en désignant comme candidat son fils et successeur, Mahamat Déby.
Enjeux sécuritaires et ambitions politiques
Dans cette optique, un nouveau corps d’armée, la force d’intervention rapide, a été créé pour assurer la sécurité du pouvoir avec à sa tête Ousman Adam Dicki, un intime du chef de l’Etat. Elle entre en concurrence directe avec la direction générale des services de sécurité des institutions de l’Etat, tenue par le général Taher Erda, qui fut intime de son père. « Bien au-delà de la présidentielle, son grand projet est d’écarter la vieille garde composée des généraux de son défunt père qui l’ont porté au pouvoir, explique un ancien cadre du régime. C’est une tâche délicate, d’autant qu’il doit préserver les équilibres ethniques »