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Démantèlement d'un réseau de trafic d'armes : L'inquiétante ubérisation du trafic d'armes en France et en Belgique

Démantèlement d'un réseau de trafic d'armes : L'inquiétante ubérisation du trafic d'armes en France et en Belgique

 4 minutes

Démantèlement d’un vaste réseau de trafic d’armes imprimées en 3D en France et en Belgique

Trois cents gendarmes mobilisés pour mettre fin à un réseau de trafic d’armes imprimées en 3D.

Une première en France qui inquiète les autorités

Le procureur de Marseille, Nicolas Bessone, a exprimé ses préoccupations lors d’une conférence de presse concernant le démantèlement d’un important réseau de trafic d’armes fabriquées grâce à des imprimantes 3D en France et en Belgique. Selon lui, cette affaire met en évidence une “ubérisation du trafic d’armes” qui constitue une première dans le pays. Trois armes saisies à la fin du mois de janvier ont été présentées lors de cette conférence.

Une opération minutieuse menée par 300 gendarmes

La division “cyber” de la gendarmerie nationale a mené des investigations approfondies pendant un an afin de démanteler ce réseau de trafic d’armes. Ces enquêtes ont inclus l’infiltration d’agents au sein de groupes Telegram. L’opération a nécessité la mobilisation de trois cents gendarmes, dont des membres du GIGN, dans les régions françaises de Provence-Alpes-Côte d’Azur, Ile-de-France, Grand-Est et Midi-Pyrénées, ainsi qu’en Belgique. Au total, quatorze personnes ont été interpellées et huit imprimantes 3D ont été récupérées, en plus de sept armes entièrement fabriquées en impression 3D et vingt-quatre armes conventionnelles. La plupart de ces armes saisies appartenaient à des collectionneurs et n’étaient pas déclarées.

Le réseau était dirigé par un homme de 26 ans déjà condamné pour une infraction liée aux stupéfiants, résidant à Roquebrune-sur-Argens dans le Var. Bien qu’il ait depuis déménagé en Belgique, un mandat d’arrêt international a été émis à son encontre afin de le remettre aux autorités françaises. Selon le colonel Hervé Pétry, chef de l’unité nationale “cyber”, cet individu partageait une mentalité de libertarien et s’inscrit dans la mouvance proarmes étasunienne qui cherche à “diffuser des armes au plus grand nombre de personnes pour se protéger de l’Etat qu’ils considèrent comme totalitaire et oppresseur”.

Dans l’affaire, six personnes ont été placées en détention provisoire, tandis que cinq autres sont sous contrôle judiciaire, dont une qui est maintenue à domicile sous bracelet électronique. Tous les suspects ont entre 18 ans et une trentaine d’années, et certains d’entre eux ont des antécédents judiciaires. Les uns étaient impliqués dans la fabrication des armes, tandis que d’autres agissaient comme intermédiaires pour leur revente. Des acheteurs, qu’ils soient collectionneurs ou liés au trafic de stupéfiants, ont également été arrêtés dans le cadre de cette opération.

Les armes fabriquées grâce à l’impression 3D utilisées pour échapper aux contrôles

Les pièces d’armes fabriquées à l’aide d’une imprimante 3D étaient envoyées une par une à l’acheteur afin de contourner les contrôles. Cette pratique, malgré son interdiction par la loi, permettait aux trafiquants de vendre ces armes sur des sites en ligne en utilisant des cryptomonnaies. Selon M. Bessone, cette situation représente une forme d’“ubérisation du trafic d’armes”, soulignant ainsi l’adaptation de la délinquance aux nouvelles techniques.

Des armes de qualité, non traçables et peu coûteuses

Parmi les armes saisies, se trouvaient des modèles de “FGC-9” pour “Fuck Gun Control”. Ces armes étaient similaires aux fusils-mitrailleurs, utilisant des cartouches de 9 millimètres, le calibre d’arme de poing le plus répandu au monde. Elles pouvaient être fabriquées depuis le domicile d’une personne en utilisant une imprimante 3D, qui pouvait être achetée pour environ 150 euros. Le processus de fabrication était largement accessible grâce à un guide facilement trouvable sur le “dark Web”.

Ces armes, de “bonne voire très bonne” qualité, étaient dépourvues de marquage, les rendant ainsi non traçables. Le colonel Pétry a précisé que ces armes étaient proches à 95% du modèle d’origine. Elles pouvaient ensuite être revendues sur le marché noir pour un prix compris entre 1 000 et 1 500 euros, ce qui est moins cher qu’une kalachnikov, selon le procureur.

Des conséquences criminelles graves

L’utilisation de ce type d’arme fabriquée en 3D a déjà eu des conséquences criminelles. En juin dernier, une tentative d’assassinat ratée a été perpétrée par deux individus sur une moto volée. Ils ont ouvert le feu sur un groupe de personnes rassemblées devant un commerce du centre de Marseille en utilisant une arme de type FGC-9. L’arme a été retrouvée par la suite et les deux suspects ont été arrêtés grâce à leur ADN, permettant ainsi leur identification.

Cet exemple n’est malheureusement pas isolé. En 2019, lors de l’attaque contre une synagogue et un restaurant turc à Halle, en Allemagne, le tireur avait utilisé une arme qu’il avait conçue et fabriquée en 3D. Cette attaque avait malheureusement causé la mort de deux personnes.

Il est nécessaire de prendre des mesures strictes pour prévenir et lutter contre l’utilisation de ces armes fabriquées grâce à l’impression 3D. Les autorités doivent adapter leurs stratégies de contrôle et de lutte contre ce trafic illégal, afin de protéger la sécurité de tous.