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Crise de l'huile d'olive au Maroc : le pays restreint les exportations pour sauver sa production

Crise de l'huile d'olive au Maroc : le pays restreint les exportations pour sauver sa production

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Le Maroc limite l’exportation de son huile d’olive pour enrayer la hausse des prix

Le Maroc prend des mesures pour freiner la hausse des prix de l’huile d’olive en limitant son exportation. Cette décision fait suite à la baisse de la production prévue pour la campagne 2023-2024, qui devrait diminuer d’un tiers en raison de la sécheresse qui frappe le pays.

Une autorisation nécessaire pour exporter de l’huile d’olive du Maroc

Désormais, il faudra obtenir une autorisation pour exporter de l’huile d’olive du Maroc. Cette mesure a été annoncée par le ministère de l’agriculture suite à la publication d’un arrêté au Bulletin officiel. L’objectif de cette mesure est de “stabiliser les prix à la consommation” et elle restera en vigueur jusqu’au 31 décembre 2024.

Selon Rachid Benali, président de la Fédération interprofessionnelle marocaine de l’olive, cette décision vise à faire face à l’augmentation des prix causée par la sécheresse. Il explique que la situation est catastrophique non seulement au Maroc, mais aussi dans tout le pourtour méditerranéen occidental. Les chaleurs extrêmes en Espagne et en Italie ont également fortement affecté les cultures, entraînant une hausse des prix de l’huile d’olive.

Une production en baisse à cause de la sécheresse

Le Maroc est classé parmi les principaux producteurs d’huile d’olive, mais il n’échappe pas à cette situation climatique préoccupante. Les températures élevées ont été fréquentes en septembre, atteignant souvent les 35°C dans la région de Meknès, première zone de production du pays. Cette situation difficile dure depuis plusieurs années, avec une diminution de la pluviométrie, des étés plus chauds et des hivers moins froids, ce qui ralentit la croissance des pousses et réduit les rendements.

80% des cultures d’oliviers au Maroc ne sont pas irriguées, ce qui les rend particulièrement vulnérables. Les autres cultures, qui nécessitent en moyenne 2 500 m3 d’eau par hectare et par an dans le nord du pays, voire le double ou le triple dans le sud, aggravent un stress hydrique déjà important. Dans ce contexte, la production d’huile d’olive devrait chuter d’un tiers pour la campagne 2023-2024. Selon Noureddine Ouazzani, qui dirige l’Agropôle olivier de Meknès, le Maroc devrait produire environ 80 000 tonnes, contre 120 000 tonnes en 2022. Cette diminution aura un impact majeur sur le secteur, qui emploie 200 000 personnes et représente les deux tiers de la superficie arboricole au Maroc ainsi qu’un quart des journées de travail dans l’agriculture.

Dans un marché marqué par l’effondrement de la production et l’absence de stocks, les prix de l’huile d’olive ont connu une forte augmentation. Cette situation préoccupe les professionnels de la filière et a conduit le Maroc à prendre des mesures pour limiter l’exportation de son huile d’olive afin de stabiliser les prix à la consommation.

La hausse des prix de l’huile d’olive au Maroc

La tonne d’huile d’olive vierge au Maroc a connu une hausse significative, passant de 70 000 dirhams en 2022 à plus de 85 000 dirhams (environ 7 765 euros). Cette tendance à la hausse est également observée pour l’huile d’olive extra-vierge, qui atteint désormais environ 100 000 dirhams la tonne, contre 85 000 en 2022.

Les réactions face à la limitation des exportations

L’annonce de la limitation de l’exportation de l’huile d’olive au Maroc n’est pas unanimement approuvée. De nombreux acteurs du secteur soulignent “l’absence de dialogue” et critiquent une décision “essentiellement politique”. Un agriculteur affirme : “Nous ne connaîtrons les détails exacts de l’arrêté que dans les prochains jours. Il est certain que l’exportation en vrac sera interdite, et des dérogations seront probablement accordées pour les produits à valeur ajoutée, tels que l’huile conditionnée. Cependant, une autorisation devra être demandée et c’est le ministère de l’agriculture qui aura le dernier mot.”

Les arguments contre la limitation des exportations

Certains acteurs du secteur mettent en garde contre les conséquences de cette limitation des exportations. Noureddine Ouazzani souligne : “Limiter les exportations ne fera pas baisser les prix. Pour produire un litre d’huile, il faut environ six kilos d’olives, ce qui représente aujourd’hui un coût de 70 dirhams sans prendre en compte les frais de transport, de trituration et de conditionnement. Quelle marge souhaite-t-on laisser aux producteurs ?”

Des précédents peu concluants et des prévisions alarmantes

Il n’est pas rare pour le Maroc de limiter l’exportation de ses produits agricoles. En février, les ventes de tomates, d’oignons et de pommes de terre vers l’Afrique de l’Ouest avaient été temporairement stoppées pour contrer la flambée des prix. Cependant, cette mesure n’a pas eu l’effet escompté, puisque le prix du kilogramme de tomates à Casablanca atteint par endroits jusqu’à 12 dirhams, soit près de trois fois plus qu’en temps normal. À la fin du mois d’août, le Haut-Commissariat au plan a estimé à 10,4 % la hausse moyenne de l’indice des produits alimentaires au Maroc sur les douze derniers mois.

En réaction aux restrictions annoncées, les professionnels de l’huile d’olive prévoient une forte baisse des exportations, qui atteignaient péniblement les 10 000 tonnes en 2022. Ils insistent sur la nécessité de soutenir les producteurs et soulignent que, en raison du changement climatique, les problèmes de sécheresse et les baisses de production se produiront tous les quatre ou cinq ans. Certains estiment qu’il aurait été plus pertinent d’accorder une subvention exceptionnelle aux agriculteurs pour faire baisser les prix.