Coup d'Etat au Gabon : Le général promet une transition pacifique et des élections libres
4 minutesCoup d’Etat au Gabon : le général Brice Oligui Nguema, investi président de transition, promet de rendre le pouvoir aux civils
Le général Brice Oligui Nguema, qui a renversé Ali Bongo Ondimba il y a cinq jours au Gabon, a prêté serment, lundi 4 septembre, comme président d’une « transition » dont il n’a pas fixé la durée, mais avec la promesse réitérée de « rendre le pouvoir aux civils » par des « élections crédibles ».
Une transition pacifique vers des élections libres
Des militaires avaient proclamé le 30 août la « fin du régime » d’Ali Bongo, qui dirigeait le Gabon depuis quatorze ans, moins d’une heure après la proclamation de sa réélection lors du scrutin contesté du 26 août. Le lendemain, les chefs des corps de l’armée et de la police, réunis dans un Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) avec à leur tête le général Oligui, avaient accusé l’entourage du chef de l’Etat – notamment son épouse et l’un de ses fils – de « détournements massifs » d’argent public et d’une « gouvernance irresponsable ».
Devant des centaines de convives, dont des ministres déchus d’Ali Bongo, des caciques de son parti mais aussi des ténors de l’opposition, le général a exhorté à participer à l’élaboration d’une future Constitution qui sera « adoptée par référendum » et de nouveaux codes électoral et pénal « plus démocratiques et respectueux des droits humains ». Il s’est aussi « engagé » à « remettre le pouvoir aux civils en organisant des élections libres, transparentes et crédibles ». Il a enfin annoncé la désignation « dans quelques jours » d’un gouvernement de transition composé de personnes « expérimentées » et « aguerries », à qui il demande la libération des « prisonniers d’opinion » et le retour des « exilés politiques ».
La fin d’un règne familial sans partage
Ali Bongo, 64 ans, en résidence surveillée depuis le putsch, avait été élu en 2009 à la mort de son père, Omar Bongo Ondimba, au pouvoir depuis plus de quarante-et-un ans. Le « patriarche » était aussi l’un des piliers de la « Françafrique », système de cooptation politique, de chasse gardée commerciale et de corruption entre la France et certaines de ses ex-colonies du continent.
Depuis son coup de force, l’armée, remerciée par la majorité des Gabonais de les avoir « libérés du clan Bongo », refuse de parler de coup d’Etat, préférant évoquer un « acte patriotique » ayant évité un « bain de sang ».
Un putsch militaire au Gabon : aucune victime signalée
Lundi dernier, le général Oligui, à la tête du coup d’État militaire au Gabon, a exprimé son étonnement face à la condamnation de certaines institutions internationales. Selon lui, les soldats n’ont rien fait d’autre que de respecter leur serment et de protéger la patrie. Il affirme que l’armée avait le choix entre tuer des Gabonais manifestant légitimement ou mettre fin à un processus électoral clairement truqué. Il précise que la décision a été prise de ne jamais revivre une telle situation dans le pays.
Réactions internationales : condamnations et distinctions
L’Union africaine, l’Union européenne, l’ONU ainsi que de nombreuses capitales occidentales ont condamné ce coup d’État tout en soulignant une “différence” avec les précédents coups d’État sur le continent africain. En effet, celui-ci a été précédé par un “coup d’État institutionnel”, selon le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell.
Engagement du nouvel homme fort et détentions arbitraires
Depuis la prise de pouvoir, le nouveau dirigeant de Libreville a rencontré divers acteurs de la société durant cinq jours. Il s’est engagé à lutter contre la corruption, à améliorer la gouvernance, à relancer l’économie et à réduire les inégalités en redistribuant les richesses aux plus démunis.
Cependant, les télévisions publiques diffusent des images de Noureddin Bongo Valentin, le fils du président déchu, de l’ex-première dame Sylvia Bongo, détenue secrètement au Gabon selon ses avocats, ainsi que d’anciens responsables de la présidence ou du cabinet de Mme Bongo, exhibant des liasses de billets. Ces personnes, qualifiées de “jeune garde”, sont accusées de “haute trahison”, de détournements massifs de fonds publics et de falsification de la signature du chef de l’État par les putschistes, qui affirment qu’ils ont été manipulés par des membres de la famille Bongo profitant des séquelles d’un AVC survenu en 2018.
À la sortie du palais présidentiel, certains membres influents du gouvernement d’Ali Bongo ont été hués tandis que d’autres ont été applaudis. Anouchka Minang, une sage-femme de 31 ans, s’indigne en déclarant : “Nous étudions mais nous ne trouvons pas d’emploi. Je suis au chômage depuis cinq ans. On nous dit que les caisses sont vides, mais on finit par trouver tout cet argent chez eux.” D’un autre côté, Lucrèce Mengué, 28 ans, se joint aux milliers de manifestants massés devant le palais et exprime : “Nous ressentons la liberté, la joie et surtout l’espoir d’un avenir meilleur”.