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L'élection présidentielle gabonaise : un déroulement douteux compromet-elle la crédibilité du scrutin ?
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L'élection présidentielle gabonaise : un déroulement douteux compromet-elle la crédibilité du scrutin ?

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Une élection présidentielle taillée sur mesure pour Ali Bongo au Gabon

Samedi 26 août, le Gabon accueillera un scrutin présidentiel qui semble favoriser l’actuel chef d’État, Ali Bongo, en lice pour un troisième mandat. Cependant, le déroulement de ce scrutin suscite des inquiétudes quant à sa crédibilité. En effet, il se déroulera à huis clos, sans la présence d’observateurs internationaux ni de journalistes étrangers.

Un environnement inadapté pour une alternance

La non-acception des demandes d’accréditation des journalistes et des différentes ambassades témoigne des conditions peu propices à une éventuelle alternance politique. Cette situation préoccupe Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, vice-président de l’Union nationale, un parti d’opposition, qui souligne que cela pourrait nuire à la crédibilité de cette élection. Au pouvoir depuis quatorze ans, Ali Bongo Ondimba, âgé de 64 ans, brigue ainsi un troisième mandat à la tête de cet État pétrolier considéré comme l’un des plus riches d’Afrique.

L’opposition désignée à la dernière minute

Le nom du principal opposant d’Ali Bongo n’a été révélé que huit jours avant le début du vote. Albert Ondo Ossa, âgé de 69 ans, a été choisi par des candidats ayant rejoint la plate-forme Alternance 2023 (A23), créée dans le but de rassembler l’opposition et d’éviter la dispersion des suffrages. Dès sa désignation, Albert Ondo Ossa s’est lancé dans une campagne intensive à travers tout le pays, qui compte environ deux millions d’habitants. Il appelle à un changement et met en avant la force de l’unité. Malgré tout, certains considèrent qu’il n’est pas le poids lourd espéré mais plutôt un choix de consensus. Selon Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, Albert Ondo Ossa incarne les principes et les valeurs qui rassemblent le plus et divisent le moins.

Un nouveau mode de scrutin contesté

Cependant, un changement dans le mode de scrutin suscite également des critiques de la part de l’opposition. En effet, le pouvoir a instauré en juillet un bulletin unique pour les élections présidentielles et législatives. Cela signifie que lorsqu’un électeur vote pour le candidat à la députation d’un parti dans sa circonscription, il votera automatiquement pour le candidat à la présidence de ce même parti, et vice versa. Cette nouvelle disposition est jugée controversée par l’opposition.

Des recours déposés devant la Cour constitutionnelle pour dénoncer la « non-séparation des pouvoirs »

Plusieurs recours ont été déposés devant la Cour constitutionnelle pour dénoncer ce qui est perçu comme une “non-séparation des pouvoirs”. Malheureusement, ces recours n’ont pas abouti à un résultat satisfaisant. Cette situation suscite des préoccupations parmi les membres de la plate-forme A23, telle que l’a exprimé François Ndong Obiang, qui déplore la violation de la liberté de choix des électeurs. Il estime que cette modification constitutionnelle cache une idée perfide, celle de faire profiter Ali Bongo des suffrages des candidats de son parti lors des élections législatives.

Albert Ondo Ossa, un candidat indépendant sans soutien politique

Albert Ondo Ossa se présente en tant que candidat indépendant et ne bénéficie d’aucun soutien politique officiel. Son bulletin de vote ne mentionne aucun candidat pour les élections législatives. En choisissant de voter pour lui, ses électeurs ne donneront donc leur voix à aucun député. Cette position soulève des interrogations quant à son impact sur la composition de l’Assemblée nationale. Toutefois, le candidat de l’opposition a promis d’engager des recours et de provoquer la dissolution de l’Assemblée nationale s’il est élu.

Les défis du scrutin face à la prédominance du Parti démocratique gabonais (PDG)

Le Parti démocratique gabonais (PDG) et ses alliés sont actuellement au pouvoir, dominant quasiment le Parlement. Ali Bongo Ondimba, élu pour la première fois en 2009 après la mort de son père, a été réélu de justesse en 2016 lors d’un scrutin vivement contesté face à Jean Ping. Son taux de participation relativement faible (59 %) et le résultat dans son fief du Haut-Ogooué, avec une participation de 99,93 % et un score de 95 % en sa faveur, ont suscité de sérieux doutes.

Malgré sa victoire, des violences ont éclaté, entraînant des décès et des destructions, dont notamment l’incendie de l’Assemblée nationale. Ali Bongo Ondimba, qui a subi un accident vasculaire cérébral en octobre 2018 laissant des séquelles physiques, mène actuellement une campagne électorale à travers le pays avec d’importants moyens financiers.

Cependant, certains analystes, tels que Mays Mouissi, soulignent les échecs du second mandat d’Ali Bongo Ondimba. Selon lui, le taux de pauvreté et le chômage des jeunes ont augmenté, tandis que les conditions de vie se sont largement détériorées. En comparaison avec la dernière élection, les électeurs peuvent donc lui reprocher de nombreuses erreurs, ce qui pourrait donner l’opportunité à l’opposition de tirer profit de cette situation. Toutefois, les conditions dans lesquelles se déroulera le vote suscitent de sérieux doutes quant à la transparence du scrutin.